Vayéra
Parmi les diverses façons de se révéler, Dieu choisit ici d’apparaître à Abraham sous la forme de trois anges, eux-mêmes transformés en êtres humains. Malgré ces deux relais-écrans de la divinité, en dépit aussi de l’ambiguïté du texte qui tantôt emploie le pluriel quand les anges parlent, tantôt le singulier, et même le tétragramme, il s’agit d’une des révélations des plus claires qu’un homme ait reçue, hormis Moïse. Abraham est informé pour la deuxième fois (mais cette fois en présence de Sara) qu’il aura un fils; dans un deuxième temps, il apprend la destruction imminente de Sodome et Gomhorre. Une sorte de mise en scène précède ces deux prophéties. Abraham reçoit les trois hommes comme des voyageurs étrangers; il les installe sous un arbre, pour un véritable festin préparé par Sara et ses domestiques: mouton, bœuf, gâteaux, lait, beurre… Il faut croire vraiment que les choses se sont produites ainsi, dans la réalité, et non pas dans l’imagination d’Abraham. C’est au cours d’un repas paisible, en accomplissant son devoir d’hospitalité, que va surgir, de façon tout aussi naturelle la parole divine. Celle-ci s’inscrit, se grave et se lit dans la vie de tous les jours; elle apporte aux hommes une réponse à leurs préoccupations, à leurs angoisses, à leurs interrogations. Point n’est besoin d’être un grand mystique pour lire dans les textes bibliques, qui sont la parole permanente de Dieu, de quelle façon comprendre les événements que l’on vit.
Le rire de Sara est aussi une réaction naturelle et saine; il prouve qu’elle a conscience de la réalité: elle est vieille et son mari est vieux. Honteuse, elle va jusqu’à nier avoir ri. Elle est incrédule, mais en elle gît un espoir irrationnel, déraisonnable, celui que toute femme porte en elle, l’espoir d’être mère. Son rire recèle donc une joie secrète, intime, qu’elle n’ose exprimer que par ce rire. Le bref dialogue entre Dieu et Sara est touchant de candeur angélique: Sara: «je n’ai pas ri». Dieu: «non, tu as ri». L’identité du fils qui naîtra sera dominée par ce rire: Ytsh’aq, il rira. Il sera l’homme du futur messianique, l’homme des lendemains qui chantent, après les difficultés, les douleurs et la souffrance viendra le temps de la délivrance, de la joie, du rire. Isaac n’appartient pas à ce monde; sa vie est une sorte de miracle permanent, constamment remise en cause et contestée; son unique vocation: annoncer l’avènement inéluctable des temps futurs…
… Suite dans le livre : «Perouch Katan»
Extrait de « Perouch Katan – BERECHIT» « Le Petit Commentaire – BERECHIT » du rabbin Claude Brahami : La Tora en 5 volumes comprenant le texte hébreu, la traduction, Targoum Onquélos, Rachi et sa traduction ainsi qu’un commentaire verset par verset, les aftarot et les 5 meguilot.
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